Le Conseil fédéral rejette l’initiative SSR et opte pour une redevance à 300 francs dès 2029
Dans son message du 19 juin 2024, le Conseil fédéral recommande au Parlement de rejeter l’initiative « 200 francs, ça suffit! (initiative SSR) » qui demande de baisser la redevance de radio-télévision des ménages à 200 francs par année et de libérer toutes les entreprises de l’assujettissement. Du point de vue du Conseil fédéral, l’initiative va trop loin: la part de la redevance allouée à la SSR baisserait alors à 630 millions de francs environ. Les conséquences sur l’offre de la SSR et sur son ancrage dans les régions linguistiques seraient trop importantes.
Baisse de la redevance de radio-télévision par étapes
Même si le Conseil fédéral est favorable à une SSR forte, il veut aussi alléger la charge financière des ménages et des entreprises, comme le demandent les auteurs de l’initiative. Il a donc décidé de mettre en œuvre une contre-proposition au niveau de l’ordonnance sur la radio et la télévision qu’il modifie sur deux points :
D’une part, la redevance annuelle des ménages sera progressivement abaissée: de 335 à 312 francs en 2027 puis à 300 francs en 2029. Pour les deux prochaines années, le montant actuel de 335 francs devrait être maintenu.
D’autre part, le Conseil fédéral relève la limite qui assujettit une entreprise à la redevance de 500’000 francs de chiffre d’affaires annuel actuellement à 1,2 millions de francs. Ainsi, dès 2027, environ 80% des entreprises soumises à la TVA ne paieront plus la redevance.
Cette baisse par étapes donne à la SSR une marge de manœuvre pour planifier et réaliser des économies. Pour l’année en cours, la SSR recevra une part de la redevance de 1,319 milliard de francs (1,25 mia de la redevance plus 69 mio. de renchérissement). Elle devrait toucher environ 1,2 milliard de francs de la redevance en 2029, soit 120 millions de moins qu’actuellement. Le fait que la compensation du renchérissement ne sera plus que partiellement ou plus du tout versée à la SSR engendrera aussi une diminution des recettes.
Concession SSR
S’agissant de la concession de la SSR, qui arrive à échéance à la fin de cette année, le Conseil fédéral a décidé de la prolonger jusqu’à fin 2028. En effet, le nouveau cadre financier pour le service public médiatique ne sera connu qu’après la votation sur l’initiative SSR. Le Conseil fédéral élaborera la nouvelle concession en fonction des moyens à disposition. Il affinera alors le mandat de la SSR pour l’orienter davantage sur l’information, l’éducation et la culture ainsi que sur les nouvelles habitudes d’utilisation du public. Quant à l’offre en ligne, elle devrait davantage se baser sur les contenus audios et vidéos.
Accord de prestations pour les services de la SSR à l’étranger
Le Conseil fédéral a aussi conclu avec la SSR un nouvel accord de prestations pour 2025 et 2026 qui porte sur le financement et le contenu des services journalistiques destinés à l’étranger. Ces services comprennent les deux offres sur l’internet de Swissinfo et tvsvizzera.it ainsi que les collaborations avec les chaînes de télévision internationales TV5MONDE et 3sat. Ils sont financés pour moitié par la Confédération et pour moitié par la SSR. La contribution fédérale est plafonnée à 19 millions de francs par année au maximum. Le cadre financier du nouvel accord 2025-2026 est restreint par rapport à l’accord 2023-2024, essentiellement en raison des mesures d’économie dictées par la Confédération et de la plus faible prise en compte du renchérissement. L’offre journalistique reste inchangée. Le nouvel accord prévoit de renforcer les synergies entre tvsvizzera.it et Swissinfo.
Le commentaire de Cominmag
Cette prise de position marque un rejet clair du Conseil Fédéral contre l’initiative de l’UDC contre le service public. Toutefois, les sept sages ont quand même opté pour une baisse de la redevance à CHF 300. Une décision qui intervient dans un contexte économique frappée par l’inflation et le recul de la publicité. Cela aura inévitablement un impact sur les prestations proposées actuellement. Mais la SSR devrait pouvoir sauver l’essentiel : une information de qualité et une couverture de toutes les régions : des conditions sine qua non pour préserver un service public de qualité.
Un luxe dans un environnement médiatique de plus en plus fragilisé par les fake news et les dérives de l’IA, sans parler des attaques populistes qui voient dans la privatisation du service publique une manière de mettre au pas des médias jugés trop partiaux. Or, seul le service public peut proposer une pluralité de point de vues, l’affaiblir c’est remettre en cause un des piliers des états démocratiques.
La balle est maintenant dans les mains du Parlement qui pourrait lancer un contre-projet. A suivre !